GPA – Progrès social ou humainement inacceptable ?
Partager

Journées d’été – Août 2010 – Nantes
Contribution de la commission Féminisme

Nous sommes dans une société où il y a une injonction à la maternité pour les femmes : C’est la revalorisation de la maternité biologique.

Il y a une forte pression sociale sur les femmes. Pendant des siècles la société ne leur a assigné que ce but : procréer ! Cela fut le seul espace donné aux femmes pour mieux les dominer.

On fait croire aux femmes que leur accomplissement passe par la maternité. Celles qui ne le peuvent pas se sentent alors remises en cause dans leur féminité. Dans certaines sociétés, selon les temps et les lieux, une femme qui ne peut avoir d’enfant est répudiée.

La maternité est la « norme » – le référentiel social

Lorsqu’une femme est stérile, cela devient une grande souffrance de la femme et du couple. Certains couples sont donc prêts à tout pour pallier ce manque, pour résoudre le problème et supprimer cette souffrance.

On nous dit qu’il y a le « désir d’être parent »

Cela peut s’entendre bien entendu, mais cela est différent de l’obligation d’enfanter (pour la femme), ou d’avoir un enfant de ses gènes. Pour satisfaire cette envie d’être parent et face à l’impossibilité d’enfanter, il existe la possibilité de l’adoption.

Certes, tout le monde connaît les difficultés mises pour l’adoption d’un enfant… Mais au lieu de se battre pour la GPA, il pourrait y avoir les mêmes bagarres et le même lobbying pour faire évoluer les législations sur l’adoption. Or, ce n’est pas le cas… Donc il s’agit bien d’avoir un enfant « de soi », de ses propres gènes.

Le choix de la GPA

Il s’agit d’utiliser le corps d’une autre personne – une femme en l’occurrence.

Le corps humain devient un objet, un instrument de production, utilisé pour produire de la chair humaine. Il fait l’objet d’une « commande d’un enfant », suivie d’un contrat, afin d’obtenir le produit désiré, à savoir un enfant.

Le choix de la mère porteuse

S’il y a « commande » suivie d’un contrat, c’est donc qu’il y a une demande qui appelle une offre. On est donc bien dans le « marché ». De surcroit, il y a « sélection » de la mère porteuse : sur la base du dossier médical bien évidemment, car il faut se donner toutes les chances que le produit fini soit de bonne qualité.

Donc choix de la femme qui va pouvoir fabriquer un enfant sain : en bonne santé, ne fume pas, ne se drogue pas, vit dans un environnement sain ou non pollué…

La sélection de la « meilleure » mère porteuse revient comme pour les chevaux à choisir la meilleure pouliche qui donnera le meilleur étalon.

C’est son aspect « femelle » – au sens animal – qui compte, et pas la personne humaine qu’elle est.

La mère porteuse n’est plus un « sujet », mais un corps utilisé par autrui, pour autrui.

On nous dit que les femmes sont « volontaires » – qu’elles feraient cela par altruisme

Cet argument n’est-il pas pour se rassurer soi-même ? Se donner bonne conscience ? Se dire qu’on n’est pas quelqu’un qui va exploiter une autre personne pour résoudre son propre problème ?

On nous dit qu’il faudra un « consentement éclairé »… mais quand on est dans la pauvreté, la soumission volontaire existe !

Dans certains pays, des personnes sont là aussi « volontaires » pour vendre un rein, un œil… des personnes sont aussi « volontaires » pour se prostituer.

J’attends pour être convaincue de cet altruisme de voir une femme de milieu très aisé (femme de ministre, de chef d’une grande entreprise, d’un ambassadeur…) se livrer à la prostitution par amour du sexe (dans ce cas elle aura des amants, mais pas des clients !), ou prêter son ventre à une inconnue, donner un an ou plus de sa vie, avec la part de danger qu’il peut y avoir dans tout accouchement… simplement pour faire plaisir à un couple en mal d’enfant…

On nous dit que des femmes aiment se sentir enceinte, qu’il n’y aurait pas rémunération, mais simple défraiement

S’adjuger le corps d’autrui pendant plus d’un an ce n’est pas rien !

Or, nous sommes bien dans une transaction, un contrat de droit privé, donc c’est la loi de l’offre et de la demande qui s’appliquerait forcément.

S’il n’y a pas assez de « volontaires » en France, on retombera dans la « surenchère » (avec des « dessous de table ») ou dans le voyage à l’étranger que cette demande de législation cherche à éviter.

On nous dit que les choses sont claires dès le début : que la mère porteuse sait que cet enfant n’est pas le sien, donc elle ne s’attachera pas à l’enfant qui occupera son ventre pendant 9 mois.

Il faut considérer les situations culturelles selon les différentes sociétés et leur rapport à l’enfant dans une famille n’est pas le même. La situation est sans aucun doute différente dans des pays comme le Maroc (cas des petites bonnes), l’Inde, le Brésil, la Thaïlande… et la France, et la place des femmes différente également. Le rapport à l’enfant dans la famille nucléaire française et la famille au sens large est également différent.

Dans notre pays, de nombreux ouvrages liés aux travaux des psychanalystes mettent en évidence le lien entre la femme et le fœtus : d’amour ou de rejet… mais lien néanmoins !

Ces 9 mois peuvent-ils être « neutres » pour la mère porteuse, faire comme si son corps n’était pas occupé par ce singulier « locataire » qui est dans son ventre ?

On nous dit : « il faut donner une identité à ces enfants qui sont nés de la GPA à l’étranger », et on met en avant les « droits de l’enfant ».

Alors que, d’une part les parents « d’intention » ont fait le choix en toute connaissance de cause de se mettre dans l’illégalité. Il vaudrait mieux parler dans ce cas de « droit A l’enfant » que certain/es veulent faire reconnaître et non des « droits DE l’enfant ».
D’autre part, il existe la solution de l’adoption pour ces enfants, pour leur donner une identité, sans leur mentir.

On nous parle de l’enfant né par la GPA, mais quid des enfants de la mère porteuse ?

En effet, on prévoit que la mère porteuse devrait avoir déjà accouché (cela limite effectivement un peu les risques liés à l’accouchement)

On peut supposer qu’il y a un mari, et donc que celui-ci, altruiste aussi, est entièrement d’accord pour que sa femme devienne mère porteuse.

Mais se pose-t-on la question des enfants de cette femme ?

S’il y a un ou deux enfants ou plus, entre 2 ans et 10 ans… que vont penser ces enfants quand on va leur expliquer que le bébé dans le ventre de maman n’est pas un petit frère ni une petite sœur, pas l’enfant du papa… et qu’on va le donner quand il naitra …

Je pense que cela est porteur pour ces enfants de graves traumatismes (va-t-on me donner moi aussi – voire me vendre ?)

On nous dit « faut légiférer pour encadrer » ; il faut être pragmatiques car
la pratique est là, si on ne légifère pas, les couples iront à l’étranger et les conditions d’exploitation des femmes est encore bien pire dans ces pays (donc on reconnait qu’il y a « exploitation », non pas de « l’homme par l’homme » mais bien « d’une femme par une femme » (ou un couple).

Cela existe ailleurs, donc cela continuera d’exister.

Mais, il y a d’autres situations qui existent à l’étranger, et ce n’est pas pour cela qu’on veut les légaliser en France, comme la vente d’organes ou de sang.

On nous dit « les mères porteuses » font un travail social : rendre service et supprimer la souffrance

Nous sommes dans un temps / une société, où toute inégalité est vécue comme une injustice insupportable et où on cherche A TOUT PRIX, quel que soit le prix, à supprimer cette injustice, fut-ce au détriment de la dignité des autres êtres humains.

Une femme est infertile ou n’a pas d’utérus : au nom du » droit à l’enfant », on va avoir recours à la location d’un ventre d’une autre femme…

Un homme handicapé a « droit à une sexualité épanouie »… au nom de ce « droit », on va lui fournir une assistante sexuelle…

Il faut se poser quelques questions

Quel type de société veut-on ? une société qui exploite les plus pauvres de ses sujets pour les réduire à un rôle d’objet ?

La loi doit-elle répondre à toutes les souffrances ?